Ethnobotanique
De l’herbier aux symboles
À partir de 1935, c’est cependant de Ganay qui attache une importance centrale aux recherches ethnobotaniques et à la constitution d’un herbier exhaustif (dont une partie est aujourd’hui conservée dans le fonds Solange-de-Ganay des archives de la Bibliothèque Éric-de-Dampierre, à Nanterre[9]). Elle mène en effet de front des enquêtes ethnozoologiques et ethnobotaniques et projette d’écrire un livre intitulé Bêtes et plantes du pays dogon. En 1937, elle précise ainsi avoir « recueilli tous les renseignements en ce qui concerne les mythes de création des animaux et des plantes, les méthodes de culture et d’élevage ; tous les usages religieux, magiques et techniques, les interdits qui s’y rapportent ; les jeux et tout ce qui concerne l’alimentation et la médecine »[10]. Griaule et elle s’intéressent également à l’abattage des arbres pour la taille des pirogues dans la région du Bahr Salamat, lors de la mission Niger-Lac Iro (1939)[11].
Après la Seconde guerre mondiale, Solange de Ganay reprend l’ensemble des données collectées chez les Dogon à partir de 1937 afin de documenter deux cent soixante-dix-huit plantes. Les différentes informations sont classées par catégories : « récolte », « religion-magie », « médecine », « usage alimentaire », « agricole » ou « religieux », « usages matériels », ou encore « teinture ». En 1937, de nombreuses fiches thématiques générales ont en outre été rédigées sur la classification des plantes sauvages ou cultivées, mais aussi sur la vie de l’arbre, sur les techniques de plantation, ou encore sur les noms donnés aux différentes parties des végétaux. Ce travail à la jonction entre ethnolinguistique et ethnobotanique ouvre alors la voie aux travaux sur le symbolisme des plantes. De Ganay note ainsi que « les Dogons n’ont pas de mot pour désigner le “végétal” – la “plante” (ou “l’animal”) en général – c’est pourquoi ils ont classé les végétaux suivant leur aspect – la façon dont ils [sic] poussent ou leurs analogies avec l’être humain »[12]. Après la Seconde guerre mondiale, ce travail sur les analogies se révèlera central chez Griaule et Germaine Dieterlen[13].