Ethnozoologie
Savoirs locaux
L’intérêt pour les savoirs zoologiques locaux ne se réduit cependant pas au domaine zoologique ou à la chasse, source de pratiques partagées et de rencontres entre ethnologues et population locale. Dans les années 1930, les fiches qui accompagnent les différents spécimens zoologiques ou entomologiques[10] sont complétées par des fiches thématiques intitulées « Ethnozoologie », « Médecine vétérinaire » ou « Zoologie dogon ». Les données qu’elles contiennent ont été obtenues auprès d’informateurs locaux et rassemblent plusieurs catégories de renseignements : « usages », « alimentation », « agriculture », « chasse », « zoologie », mais aussi « rites », « croyances » ou « religion »... Comme le note Griaule, il s’agit de documenter à la fois les « idées » que les populations ont sur les animaux et leurs « répercussions intéressantes sur la vie locale »[11].
L’un des chantiers les plus importants menés dans les années 1930 porte sur les présages liés aux différentes espèces animales (« Un essaim d’abeilles s’installe dans une maison → signe de mort », « Mante religieuse. Quand elle se pose sur l’H[omme], c’est bon pour lui », etc.[12]). En 1935, lors de la mission Paulme-Lifchitz, les deux ethnologues recueillent de nombreuses données sur la place des animaux dans la littérature orale dogon. Au cours des différentes missions des années 1930, la connaissance de la faune sert plus largement la compréhension fine de plusieurs aspects magico-religieux, dont le plus connu concerne la divination par le chacal chez les Dogon du Mali (ancien Soudan français)[13]. Après la Seconde guerre mondiale, le chacal sera d’ailleurs au centre des développements cosmologiques de l’ethnologie des Dogon[14]. L’identification des animaux joue également un rôle important dans l’étude des masques dogon. La typologie qu’en propose Griaule débute ainsi par trois catégories de masques zoomorphes, représentant des mammifères, des oiseaux et des sauriens[15].